Juvéniles au printemps : les bons gestes de prise en charge

par Jean-François Courreau

Oiseaux du Monde n°406 – Avril 2023

Attention

Face à un animal blessé, il ne faut pas s’improviser vétérinaire ni soigneur ! Il faut impérativement trouver un centre de soins pour la faune sauvage pour qu’il puisse bénéficier des soins indispensables à sa survie. Par la loi, les centres de soins sont les seuls habilités en France à soigner un animal de la faune sauvage trouvé en détresse, c’est-à-dire dont la vie est en péril.

Il y a une centaine de centres de soins en France, de toutes tailles, accueillant de moins de 100 à plus de 7000 animaux par an. Pour les trouver, une cartographie est disponible sur ce site : https://www.reseau-soins-faune-sauvage.com/.

Avant toute intervention

Chouettes hulottes juvéniles
[© Céline Grisot – Faune Alfort]

On observe discrètement l’animal de loin et on s’assure qu’on ne voit pas, dans l’heure qui suit, un parent se manifester. La plupart du temps, les juvéniles d’oiseaux sortis du nid sont encore nourris et, pour les juvéniles de mammifères, la mère n’est souvent pas loin. Si on pense qu’un juvénile est orphelin, il faut en être sûr ! Un ramassage inutile lui sera préjudiciable.

Pour la manipulation

Manipuler un jeune animal n’engendrera pas son abandon. Donc, il est tout à fait possible de ramasser un jeune pour le remettre tout simplement dans son nid ou l’éloigner d’une zone dangereuse.

Par principe, il ne faut jamais manipuler d’animaux sauvages à mains nues (peu importe l’espèce) et il faut mettre des gants adaptés aux moyens de défense de l’animal, y compris s’il est jeune. Extrêmement rare avec les oiseaux, la transmission de maladies des mammifères à l’Homme est assez fréquente. Le nettoyage et la désinfection des mains est à réaliser avant et après la manipulation.

Ecureuil roux juvénile [© Céline Grisot – Faune Alfort]

Pour le transport

Le contenant le plus adapté pour les oiseaux est le carton (percé de trous) et pour les mammifères une boite de transport à chat ou à chien. L’optimum de taille est juste un peu plus grand que la longueur de l’animal. Il faut absolument s’assurer que le contenant est bien fermé, surtout pour les gros animaux comme les faons, renardeaux, marcassins … car, avec le stress, ils peuvent se débattre et s’échapper dans le véhicule !

→ N’est pas en détresse

Mésanges charbonnières oisillons
[© Céline Grisot – Faune Alfort]
  1. Tout juvénile en bonne santé observé dans son nid/terrier.
  2. Un oisillon observé hors du nid et/ou au sol si :
    • Il ne présente pas de blessures.
    • Il est bien plumé, réactif, volète maladroitement.
    • Il n’y a pas de cadavre d’adulte à proximité.
      A noter :
      Les jeunes rapaces nocturnes sortent du nid bien avant de savoir voler (excepté pour l’Effraie des clochers). Les chouettes (hulottes, chevêches) et les hiboux (grand-duc, moyen-duc et petit-duc), âgés de quelques semaines et vêtus de leur duvet, sortent de leurs nids bien avant de savoir voler. Les parents continuent de prendre soin d’eux !
  3. Juvénile de mammifère de petites espèces (hérissons, écureuils, loirs, lapins de garenne, …) et carnivores (renardeaux, fouineaux, …) observé hors du nid et/ou au sol si :
    • Il ne présente pas de blessures.
    • Il a beaucoup de poils (ou pics), a les yeux ouverts
    • Il se promène (la nuit pour les hérissons, loirs, lérots) et est réactif.
    • Il n’y a pas de cadavre d’adulte à proximité.
      A noter :
      Chez les jeunes carnivores, lors d’un changement de tanière, la mère va transporter un à un ses petits de l’ancien au nouveau nid. Durant le transport, elle laisse les autres petits seuls, mais ne tarde pas à revenir pour aller chercher le reste de la fratrie.
      En avril et mai, il est classique d’observer de jeunes renards roux hors de la tanière : ils explorent, jouent et développent des techniques de chasse très tôt. Les adultes sont en général à faible distance.
      Un petit hérisson (moins de 200g) est sevré et capable de se débrouiller seul s’il accepte de la nourriture (croquette pour chat, par exemple).
  4. Faon, levraut si :
    • Il est observé seul, couché au sol (souvent dans des hautes herbes) ou se promenant, réactif.
    • Il ne présente pas de blessures.
    • Il n’y a pas de cadavre de femelle adulte à proximité.
      A noter :
      Ce sont des espèces nidifuges, la mère laisse ses petits très vite seuls et parfois durant des périodes très longues. La seule défense qu’ont les jeunes est simple : l’immobilité et la solitude. Cela leur permet de ne pas être détecté par des prédateurs. La mère reste donc souvent à l’écart de ses petits, cachés dans les herbes, pour s’alimenter ou se cacher d’une menace immédiate (comme, par exemple, un humain qui s’approche). La mère ne revient vers son petit que pour des tétées rapides.
      Recueillir un faon ou un levraut qui semble abandonné est donc une très grosse erreur ! Il faut le remettre dans les 24h à l’endroit où il a été trouvé ! Passé ce délai, la mère ne sera plus sur place, il est orphelin et il faut impérativement l’amener en centre de soins.
Faon de chevreuil mordu par un chien [© Céline Grisot – Faune Alfort]

En résumé

Ne pas toucher ces jeunes animaux, ils sont dans leur phase d’émancipation et/ou ce sont des espèces nidifuges. Les parents continuent de s’en occuper : ils les surveillent de loin ou se sont éloignés car effrayés par l’humain ou s’occupent d’autres jeunes.

Recueillir un jeune animal alors qu’il n’est pas réellement en danger est extrêmement préjudiciable pour lui : pour son élevage, rien ne vaut la mère ! Il ne faut intervenir qu’en cas de danger immédiat (route, véhicule, prédateur), juste pour le mettre en sécurité en l’éloignant un peu ou en le mettant en hauteur.


Retrouvez cet article et bien d’autres

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→ Est en détresse :

Merles noirs juvéniles [© Céline Grisot – Faune Alfort]
  1. Un oisillon si :
    • Il présente des blessures apparentes, saignements, membres tordus.
    • Il semble affaibli (yeux mi-clos, absence de réactivité, froid), il est allongé sur le flanc.
    • Il semble affaibli au pied d’un arbre coupé, auprès d’un nid détruit.
    • Il est au sol ne sachant pas voler, avec un plumage incomplet et les plumes de queue et d’ailes courtes.
  2. Un juvénile de mammifère de petites espèces (hérisson, écureuil, loir, lérot, lapin de garenne, …), carnivores (renardeaux, fouineaux, …), faon, levraut si :
    • Il est très jeune (yeux encore fermés, pics blancs pour les hérissons, peu de poils) et observé seul et/ou hors du nid/terrier. Exceptions : faon et levraut.
    • Il présente des blessures apparentes, saignements, membres tordus, pelage en mauvais état.
    • Il semble affaibli (yeux mi-clos, absence de réactivité, froid), il est allongé sur le flanc.
    • Il y a un cadavre de femelle adulte à proximité.
      A noter :
      Hérisson, Loir, Lérot (espèces nocturnes) : en détresse si errant en pleine journée.
      Ecureuil :  en détresse si au pied d’un arbre coupé, auprès d’un nid tombé.
      Pipistrelle : ne pas confondre adulte et juvénile, un adulte pèse à peine 5 g !
Renardeau roux
[© Céline Grisot – Faune Alfort]

→ L’animal est en détresse, que faire ?

Pie bavarde juvénile
[© Céline Grisot – Faune Alfort]
  1. Un oisillon :
    Il n’est pas blessé / affaibli, il n’y a pas de cadavre de parent à proximité MAIS il ne sait pas voler et présente un plumage incomplet : il est certainement tombé du nid !
    • Essayer de retrouver le nid et de le remettre dedans.
  2. Un oisillon, petit mammifère, carnivore, faon, levraut :
    Il est blessé/affaibli, au moins un parent est mort, le nid n’est pas retrouvé ou il est détruit : il a besoin d’une aide d’urgence.
    • Le ramasser et le mettre dans un carton ou une boite de transport bien fermé(e), adapté(e) à sa taille, percé(e), tapissé(e) de papier journal. NB : pas de cage à barreaux.
    • Le mettre au chaud (25/30°C) mais pas directement collé à la source de chaleur car il y a risque de brûlure et/ou de déshydratation. Une bouillotte peut être confectionnée à l’aide d’une bouteille d’eau chaude, enroulée dans un tissu ; elle doit être calée pour ne pas risquer d’écraser.
    • Le laisser dans une pièce isolée, au calme. Il stressera moins dans la pénombre.
    • Contacter rapidement un centre de soins ou un vétérinaire qui a l’habitude de la faune sauvage.

Si le transfert n’est pas immédiat :

  • Le manipuler le moins possible, ne pas lui parler, ne pas le caresser. Les animaux sauvages sont très stressés au contact de l’Homme, cela pourrait aggraver son état.
  • Ne pas essayez de le nourrir : dans son état, il pourrait avoir du mal à digérer et en mourir.
  • Ne pas l’obliger à boire : dans son état, il pourrait faire une fausse route ; tout au plus, mettre à sa disposition une soucoupe (attention qu’il ne tombe pas dedans et prenne froid).
  • Ne pas donner de lait à un jeune mammifère : il peut ne pas supporter le lait choisi, tout dépend de son espèce.
Hérisson commun juvénile [© Céline Grisot – Faune Alfort]

Le Professeur Jean-François Courreau est le président de l’association Faune Alfort (www.faune-alfort.org), dont l’UOF est membre, et il était responsable de l’unité pédagogique de zootechnie à l’École vétérinaire de Maisons-Alfort. Nous avons eu le plaisir de l’accueillir récemment en visio-conférence sur le thème « Les centres de soin pour la faune sauvage en France » qui sera bientôt disponible en replay pour les adhérents de l’Union Ornithologique de France.

1 Commentaire

    • HENNEBIQUE Jean Pierre sur 26 avril 2023 à 20 h 09 min
    • Répondre

    Bonjour,
    j’ai eu deux expériences:
    1) une jeune pie refusée par le centre parce-que c’est un nuisible !!!!!
    2) une biche avec une patte cassée ! Réponse: c’est un « gibier », donc euthanasiée !
    réflexion: il ne peut être que sur pied ou mort .

    Merci la loi

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